À Saint-Antoine-sur-Richelieu
Dixième enfant d’Olivier Durocher et de Geneviève Durocher, famille très respectée à Saint-Antoine-sur-Richelieu (Québec), Eulalie Durocher naît le 6 octobre 1811. Elle reçoit son éducation première de sa mère, ex-élève des Ursulines à Québec, et de son grand-père, ancien soldat de Carillon. Durant deux ans, elle fréquente le pensionnat de Saint-Denys-sur-Richelieu tenu par les religieuses de la Congrégation de Notre-Dame. Malgré sa faible constitution, elle est une enfant vive et joyeuse. Toutefois, des problèmes de santé l’empêchent de poursuivre ses études et son rêve de vie religieuse semble compromis.
Adolescente, Eulalie monte fièrement son beau cheval César pour visiter ses amis, les malades et les moins fortunés de son village. Elle aime aussi se rendre à l’église pour prier et adorer Jésus présent au Tabernacle. À la mort de sa mère, Eulalie a 18 ans. L’épreuve est grande, mais la jeune femme prend courageusement la direction du foyer.
À Beloeil
Peu après, son frère Théophile, nommé à la cure de Beloeil, invite son père et sa sœur à venir habiter le presbytère Saint-Matthieu. Gouvernante et hôtesse des lieux durant 12 ans (1831-1843), Eulalie accueille les prêtres en repos et s’engage dans la paroisse et la société de son milieu. Assistée de son amie, Mélodie Dufresne, elle visite les démunis, enseigne le catéchisme aux enfants, organise les célébrations liturgiques, soutient les familles dans les moments difficiles, entraîne les bénévoles dans une action concertée.
À l’arrivée des Oblats de Marie-Immaculé à Saint-Hilaire, en 1841, elle collabore à leur mission d’évangélisation et fonde l’association des Enfants de Marie, la première du genre au Canada. La force de son rayonnement et sa personnalité joyeuse attirent et transforment les jeunes filles.
Son séjour à Beloeil marque une étape importante dans sa vie. Instruite du climat politique et des besoins du pays, Eulalie déplore la pauvreté de l’instruction religieuse et le manque d’écoles, spécialement pour les filles. Le désir de la vie religieuse l’habite toujours, et elle rêve que de petits couvents soient érigés dans les paroisses. Elle accepterait de se joindre à une Communauté que Mgr Ignace Bourget ferait venir de France.
À Longueuil
À sa grande déception, les religieuses de Marseille ne peuvent venir au Canada. Mgr Bourget qui connaît bien les aspirations et les aptitudes d’Eulalie Durocher l’incite donc à fonder elle-même cette Communauté. Le 28 octobre 1843, Eulalie et Mélodie Dufresne viennent rejoindre Henriette Céré qui enseigne déjà dans l’école de la Fabrique, à Longueuil. Cette maison offerte par le curé Moïse Brassard sera le berceau de la Congrégation.
Mener de front l’initiation à la vie religieuse et un nouveau projet d’éducation n’est pas une tâche facile. Surtout que les pionnières rencontrent plusieurs obstacles : oppositions, pauvreté, critiques, incompréhensions. Une foi profonde, une ouverture sociale et un amour ardent pour la jeunesse permettent d’assurer des bases solides à l’Institut.
Sous le nom de mère Marie-Rose, Eulalie s’adjoint des femmes de talent et elle voit à leur assurer une excellente préparation pédagogique. La collaboration des Frères des Écoles chrétiennes et celle des Oblats est précieuse, à cet égard. Selon sa vision, il faut donner à l’enfant, une éducation complète, au point de vue spirituel, scolaire, artistique, social.
Du vivant de la fondatrice, quatre maisons sont érigées : les couvents de Longueuil, de Beloeil, de Saint-Lin et de Saint-Timothée. En vue de rendre l’éducation accessible au plus grand nombre, elle a voulu qu’à côté de chaque pensionnat se trouve une école où le même programme puisse être enseigné gratuitement, grâce au revenu du pensionnat.
Mère Marie-Rose assume la direction de la jeune congrégation jusqu’à sa mort prématurée, six ans plus tard, en 1849. Les témoignages recueillis à cette occasion attestent la sainteté de sa vie toute consacrée à Dieu et au prochain. En 1982, lors de sa béatification à Rome, l’Église l’a reconnue comme une femme apostolique et une messagère des temps nouveaux.
Depuis 2004, elle repose dans la chapelle Marie-Rose, à la cocathédrale de Longueuil.